Le chef de l'agence d'espionnage américaine a vigoureusement défendu mercredi les programmes de surveillance des communications révélés par un ex-consultant de 29 ans réfugié à Hong Kong, assurant qu'ils avaient permis de déjouer "des dizaines" d'actes terroristes...
L'audition du général Keith Alexander, directeur de l'Agence nationale de sécurité (NSA), devant le Sénat américain a débuté quelques heures après la diffusion, par le South China Morning Post, d'un nouvel entretien d'Edward Snowden (interview à lire ici), dans lequel la source du Washington Post et du Guardian assure vouloir rester à Hong Kong pour y "combattre le gouvernement américain dans les tribunaux".
L'espion en chef des Etats-Unis a apporté un démenti succinct à l'une des accusations de M. Snowden, qui a affirmé qu'il était capable, à partir d'une adresse de courrier électronique, de lire les correspondances de n'importe qui, même du président des Etats-Unis. "Vrai ou faux ?", a demandé à M. Alexander la sénatrice Susan Collins. "Faux, je ne connais aucun moyen de faire cela", a-t-il répondu.
Fidèle à la ligne adoptée par l'administration de Barack Obama, il a martelé que ces programmes étaient indispensables : "Il s'agit de dizaines d'actes terroristes que (ces programmes) ont contribué à empêcher (...) ici et à l'étranger", a-t-il assuré, en précisant qu'il espérait rendre public le chiffre exact d'ici une semaine.
Selon lui, le système d'interception des communications d'internet baptisé Prism a joué un rôle crucial pour déjouer en 2009 un projet d'attentat dans le métro de New York fomenté par un jeune Afghan, Najibullah Zazi. Il a averti que le renseignement américain avait déjà souffert des fuites.
"Notre sécurité a été compromise. Il n'y a aucun doute que nous avons perdu des capacités à cause de cela. Les Etats-Unis mais aussi les alliés que nous avons aidés ne seront plus autant en sécurité qu'ils l'étaient il y a deux semaines", a-t-il dit.
Le général Alexander a par ailleurs déclaré qu'il avait "de graves inquiétudes" sur la manière dont Snowden avait pu avoir accès à des informations classées aussi importantes alors qu'il était peu diplômé et qu'il n'avait pas beaucoup d'expérience professionnelle, notant: "Nous allons devoir examiner cela de près".
Le chef de la NSA a aussi pris acte du débat sur la protection de la vie privée, relancé depuis quelques jours. Il a promis de déclassifier plus de documents. "Le problème est que nous n'avons pas été capables de nous expliquer car c'est classé secret", a-t-il justifié. "Nous fonctionnons tous les jours selon des règles strictes, et nous rendons des comptes dans le cadre d'un des régimes de supervision les plus rigoureux du gouvernement", a-t-il rappelé dans une déclaration écrite.
Trois jours après avoir revendiqué au grand jour être la "taupe" à l'origine des révélations sur ces programmes secrets, l'ex-consultant de la NSA a fourni mercredi plus de détails sur les méthodes d'espionnage américaines. "Nous piratons les systèmes centraux des réseaux - comme d'énormes routeurs internet, en général - qui nous donnent accès aux communications de centaines de milliers d'ordinateurs sans avoir à pirater chacun d'entre eux", résume-t-il dans l'entretien accordé au quotidien de Hong Kong, où il est réfugié depuis le 20 mai.
Parmi les cibles de la NSA, des centaines sont visées depuis 2009 à Hong Kong ou en Chine, a affirmé Edward Snowden, qui dit agir notamment pour dénoncer "l'hypocrisie du gouvernement américain quand il assure qu'il n'espionne pas d'infrastructures civiles, au contraire de ses adversaires".
"Je ne suis ni un traître, ni un héros. Je suis un Américain", affirme-t-il, depuis un endroit tenu secret à Hong Kong: "Je crois en la liberté d'expression. J'ai agi en toute bonne foi, et je pense que le public a le droit de se faire sa propre opinion lui-même".
"Ceux qui pensent que j'ai commis une erreur en choisissant de me rendre à Hong Kong ne comprennent pas mes intentions. Je ne suis pas ici pour fuir la justice, mais pour révéler des faits répréhensibles", ajoute-t-il encore. "J'ai eu plusieurs fois l'occasion de fuir Hong Kong, mais je préférerais rester et combattre le gouvernement américain dans les tribunaux", déclare le jeune homme, affirmant ne pas avoir l'intention de quitter Hong Kong "tant qu'on ne lui demande pas de partir".
"Malheureusement, le gouvernement américain harcèle les autorités de Hong Kong pour m'empêcher de continuer mon travail", poursuit-il. Dans un entretien accordé à la chaîne russe Russia Today, le fondateur de WikiLeaks Julian Assange a de son côté conseillé mercredi à l'Américain de se réfugier en Russie, qui serait prête à examiner une demande d'asile, ou en Amérique du Sud.
"Tout ce que je peux faire (...), c'est espérer qu'il y aura des gouvernements dans le monde qui refuseront d'être harcelés par les Etats-Unis pour persécuter des personnes qui cherchent un asile politique", a pour sa part estimé Snowden.
Sources : AFP - South China Morning Post - Russia Today
Montage : Samuel Cour
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