Le G20 exclut une "guerre des monnaies", la dette divise

Le G20 a conclu sa réunion samedi à Moscou en promettant de ne pas s'engager dans une "guerre des monnaies" et a remis à plus tard l'adoption de nouveaux objectifs de réduction de la dette en raison de la conjoncture économique mondiale toujours fragile. Les ministres du G20 se gardent dans leur communiqué final de critiquer la politique de relance du Japon, qui a fait chuter le yen de 20% et suscité les protestations de ses rivaux commerciaux...

A l'issue de nouvelles négociations vendredi soir, ils se sont néanmoins entendus pour intégrer dans le texte final un engagement à ne pas procéder à des dévaluations compétitives de leurs monnaies et à ne pas déterminer de cibles pour les taux de change. "Nous nous abstiendrons de procéder à des dévaluations compétitives", peut-on lire samedi dans le communiqué.

"Un changement de politique monétaire dans un pays a des conséquences sur les autres pays", a dit le ministre russe des Finances, Anton Silouanov. Il doit y avoir compétition entre les économies, pas entre les monnaies, a-t-il poursuivi, "c'est ce que les gouvernements doivent faire, et non manipuler les marchés des changes."

Jugeant exagéré d'évoquer une guerre des monnaies, la directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), Christine Lagarde, a salué "la bonne nouvelle" de voir le G20 répondre à la situation en empruntant la voie "de la coopération et non celle du conflit".

L'engagement du G7 à refuser les dévaluations compétitives, qui met implicitement le Japon en porte-à-faux, ne devait initialement pas figurer dans le communiqué du G20 en raison, notamment, des réticences exprimées par la Chine.

"La formulation a été renforcée après nos discussions hier soir (vendredi)", a souligné le ministre canadien des Finances, Jim Flaherty. "Le texte est plus fort qu'à l'origine, mais il était évident que tous ceux qui étaient autour de la table voulaient éviter toute forme de dispute monétaire." "Nous avons abordé la question des changes avec un refus commun d'entrer dans une guerre des monnaies", a renchéri le ministre français de l'Economie et des Finances, Pierre Moscovici. "Nous souhaitons que l'approche sur la question des changes se passe de façon coopérative (...) en excluant les stratégies de dévaluation agressives", a-t-il ajouté. "C'est pour cela que nous sommes tombés d'accord pour dire que ce sont les marchés qui doivent fixer les taux de change."

Le communiqué ménage le Japon en soulignant que la politique monétaire de chaque pays doit viser à garantir la stabilité des prix et la reprise économique - ce qui revient à donner un blanc -seing aux pays dont la chute de la monnaie est alimentée par une politique de relance. Il réitère l'engagement pris par le G20 en novembre dernier d'oeuvrer à une plus grande "flexibilité des taux de change pour refléter les fondamentaux (économiques) et éviter les défauts d'alignement persistants de taux de change".

Le communiqué contient également un engagement en faveur d'une stratégie budgétaire à moyen terme mais il se garde de définir des objectifs précis à court terme. L'accord sur la réduction de la dette conclu par les pays du G20 à Toronto en 2010 doit expirer cette année s'il n'est pas reconduit lors du sommet de Saint-Pétersbourg programmé en septembre prochain.

"Les économies développées vont élaborer une stratégie budgétaire crédible à moyen terme (...) d'ici au sommet de Saint-Petersbourg", dit le communiqué. 

Les Etats-Unis, qui mènent une politique monétaire accommodante, ont insisté pour que le texte reconnaisse que les objectifs de consolidation budgétaire doivent tenir compte de la situation économique à court terme.

Anton Silouanov a reconnu que le G20 n'était pas parvenu à un accord sur les objectifs de déficit budgétaire à moyen terme. "Nous espérons que les pays membres auront progressé d'ici le mois d'avril (...) sur l'adoption de nouveaux indicateurs budgétaires, à la fois sur le déficit et le niveau de la dette gouvernementale", a-t-il déclaré. Il a également mis en garde dans son discours devant ses homologues contre les "conséquences imprévisibles" des mesures de politique monétaire non conventionnelles.

"Les banques centrales qui mènent de telles politiques d'assouplissement monétaire devraient surveiller de près les risques que cela fait peser, aussi bien sur le plan national qu'international", a dit le ministre russe. Anton Silouanov a affirmé que la relance de la croissance mondiale passait davantage par "des réformes structurelles dans tous les pays" que par des ajustements de changes.

La question de la consolidation budgétaire a divisé les participants à la réunion de Moscou. Certains pays, Etats-Unis en tête, ont estimé que son rythme a été trop élevé jusqu'à présent, alors que l'Allemagne, la Commission européenne et la Banque centrale européenne (BCE) ont au contraire critiqué la lenteur des progrès, source d'incertitude à leurs yeux.

"Certains craignent au sein du G20, et pas seulement les Américains, que se fixer un objectif (...) qui impliquerait une consolidation (budgétaire) très importante sur une très longue période revienne à dire au monde entier qu'on va imposer un frein budgétaire", avait expliqué vendredi un délégué du Groupe. "C'est n'est pas le bon message à adresser au moment où l'on s'inquiète pour la croissance à court terme", ajoutait-il.

Source : Reuters
©Crédit photo : REUTERS/Sergei Karpukhin

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