François Hollande sera forcément affecté par l'affaire Jérôme Cahuzac, qui porte un coup à la "République exemplaire" que le président appelait de ses voeux pour marquer une rupture avec des pratiques passées. L'Elysée n'a pas tardé à réagir après les aveux de l'ancien ministre du Budget, qui a reconnu détenir un compte bancaire à l'étranger depuis une vingtaine d'années, ce qu'il niait depuis quatre mois...
Dans un communiqué aussi sévère que lapidaire publié peu après la confession, sur son blog, de Jérôme Cahuzac, le président de la République prend acte "avec sévérité" de l'aveu de l'ancien ministre, coupable d'une "faute impardonnable".
Le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, a quant à lui dit sa "tristesse" et sa "consternation" devant la "cruelle vérité" d'un homme qui a "menti devant le président de la République, le Premier ministre et la représentation nationale".
Au-delà de Jérôme Cahuzac, nombre de réactions à droite comme à gauche, où la majorité socialiste est K.O. debout, prennent pour cible le chef de l'Etat. Le Parti communiste dénonce un "scandale d'Etat" et une "bombe politique", le Front national une "affaire d'Etat", les écologistes "un drame pour la démocratie" tandis que l'UMP demande des explications au président, qui ne pouvait selon elle ignorer la vérité.
Cette affaire est "obligatoirement un mauvais coup pour François Hollande", pense Bruno Jeanbart, directeur général adjoint d'OpinionWay. Jean-Daniel Lévy, de l'institut Harris Interactive, souligne pour sa part que jusqu'ci, l'affaire Cahuzac avait eu peu d'impact sur le président, "les Français jugeant d'un côté la mise en cause de l'ancien ministre du Budget et de l'autre, l'action politique de François Hollande".
"S'il y avait la perception dans l'opinion que le président aurait couvert des faits juridiquement répréhensibles, cela pourrait prendre des allures d'affaire d'Etat, mais on n'en est pas là", ajoute le politologue.
Pendant la campagne électorale, François Hollande avait insisté sur la moralisation de la vie publique, au terme d'un quinquennat qui avait notamment vu les ministres Eric Woerth, Christine Lagarde et Michèle Alliot-Marie mis en cause à des degrés divers. Le président de l'UMP, Jean-François Copé, n'a pas manqué d'y faire référence mardi soir en dénonçant un "mensonge" qui "signe définitivement la fin de la gauche morale et donneuse de leçons". "François Hollande nous annonçait une 'République exemplaire'. Quel crédit accorder désormais à son équipe gouvernementale ?", ajoute celui qui se présente comme le chef de l'opposition.
Cette affaire "va jeter un soupçon de manière générale sur le comportement des politiques", pense Bruno Jeanbart. "Elle porte aussi un coup à l'idée qu'il y avait une différence entre Nicolas Sarkozy et François Hollande. Cela va donner le sentiment que droite et gauche, c'est pareil".
Pour autant, pense Jean-Daniel Lévy, la morale politique n'est pas au coeur des préoccupations des Français. "Nous restons dans un pays politique et les raisons de l'affection de l'opinion ne sont pas liées à des dimensions de probité mais d'efficacité politique et de valeurs", dit-il. A ses yeux, ce genre d'affaire "fait davantage le jeu de l'abstention, d'une forme de désaffection à l'égard des politiques que de l'extrémisme".
Déjà en berne dans les sondages, la cote de popularité du président devrait avoir d'autant plus de mal à se relever.
"C'est une difficulté supplémentaire pour espérer remonter fortement dans les semaines ou les mois qui viennent, ça risque de laisser une trace et de rendre plus difficile une reconquête même si c'est quand même toujours les questions économiques qui restent les plus importantes pour les Français", tempère Bruno Jeanbart.
Source : Reuters
©Crédit photo : REUTERS/Philippe Wojazer
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