Forte hausse de l'émigration des pays les plus touchés par la crise

Les migrations en provenance des pays les plus touchés par la crise économique en Europe ont fortement augmenté depuis 2009, selon un rapport de l'OCDE rendu public jeudi. Alors que la crise alimente une montée de la xénophobie et des populismes, le rapport aborde aussi pour la première fois la question de l'impact de l'immigration sur les finances publiques, qu'il juge faiblement positif, sauf en France...

L'émigration de ressortissants des pays les plus durement touchés par la crise, en particulier d'Europe du Sud, s'est accélérée, avec une progression de 45% entre 2009 et 2011, écrit l'Organisation pour la coopération et le développement économique, dans son dernier rapport sur les flux migratoires.

Depuis 2007, le nombre de Grecs et d'Espagnols qui émigrent vers d'autres pays de l'UE a doublé, pour atteindre respectivement 39.000 et 72.000, selon l'OCDE, qui regroupe 34 pays développés. En Allemagne, le flux d'immigrés grecs s'est accru de 73% entre 2011 et 2012, tandis que le flux d'immigrés espagnols et portugais a augmenté de près de 50% et que celui des immigrés italiens a progressé de 35%.

Globalement, l'immigration en provenance d'Inde et de Chine vers les pays de l'OCDE reste importante, mais la Pologne et la Roumanie se sont hissées parmi les trois premiers pays d'origine, derrière la Chine, sous l'effet d'une mobilité accrue au sein de l'UE.

S'agissant de l'impact des immigrés sur les finances publiques, leur impact est généralement limité, n'excédant pas 0,5% du PIB, qu'il soit positif ou négatif, écrit l'OCDE. Dans la plupart des pays, ils contribuent plus sous forme d'impôts et de cotisations sociales qu'ils ne reçoivent en prestations, a affirmé au cours d'une conférence de presse le secrétaire général de l'OCDE, Angel Gurria.

Pour le commissaire européen chargé de l'Emploi, Laszlo Andor, le rapport réfute le mythe selon lequel les migrants constituent un poids pour les Etats qui les accueillent, sa collègue Cecilia Malmström (Affaires intérieures) estimant que ces chiffres devaient permettre de contrer les mouvements xénophobes et populistes. L'OCDE estime que l'emploi est le principal déterminant de la contribution fiscale des immigrés.

Pour Jean-Christophe Dumont, chef de la division migrations à l'OCDE, "les immigrés, en général, contribuent plus en impôts et en cotisations sociales qu'ils ne reçoivent de prestations individuelles". La France serait, avec l'Allemagne et la Pologne notamment, le contre-exemple de cette affirmation avec une contribution négative des immigrés de quelque 1 450 euros par an en moyenne entre 2007 et 2009. Pour l'ensemble de l'OCDE, cette contribution est positive et s'établit à 3 280 euros.

Le particularisme français s'explique par le poids des retraites perçues par les immigrés arrivés dans les années 1960-1970 alors que les cotisations ont fortement chuté à partir des années 1980 du fait du ralentissement des arrivées de nouveaux migrants. La faible contribution des immigrés aux recettes fiscales s'explique aussi par des salaires souvent moindres que ceux des salariés français. Ils payent donc moins d'impôts et de cotisations sociales. "Il faut maintenir des politiques d'intégration, parce qu'il y a un retour immédiat sur investissement avec des gains fiscaux importants", estime M. Dumont.

Or, à cause de la crise, la situation des immigrés sur le marché du travail s'est détériorée ces dernières années. En moyenne, leur taux de chômage a augmenté de 5 points entre 2008 et 2012 (de 8,1% à 12,9%), contre trois points pour les travailleurs autochtones (5,4% à 8,7%). Un niveau jugé alarmant par M. Gurria.

Le phénomène touche particulièrement les immigrés d'Afrique du Nord, où le taux a atteint en Europe un niveau record de 27% en 2012. De même, l'an dernier, près d'un migrant au chômage sur deux était à la recherche d'un emploi depuis plus d'un an. L'OCDE considère qu'il est essentiel de lutter contre la discrimination, dont l'impact se fait sentir principalement dans le processus d'embauche.

L'OCDE montre également que les immigrés contribuent aussi bien aux métiers qualifiés qu'à ceux qui le sont moins. "L'immigration répond à des besoins assez variés, mais les gouvernements auraient intérêt à clarifier leurs objectifs et à mieux définir leur politique", prévient Jean-Christophe Dumont. "S'agit-il de répondre à des besoins de travail immédiats, d'intégrer les migrations dans une politique économique tournée vers l'innovation ou doivent-elles répondre à des objectifs démographiques ?" Autant de questions auxquelles le gouvernement français va tenter de répondre.

Lire le rapport complet de l'OCDE (en Anglais) :
International Migration Outlook 2013 | OECD Free preview | Powered by Keepeek Digital Asset Management Solution

Sources : OCDE - AFP - Le Monde

Samuel Cour

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