Les couacs internes polluent le débat budgétaire

Les désaccords entre le gouvernement et le groupe socialiste de l'Assemblée nationale ont pollué mardi le début de l'examen par les députés du projet de loi de finances pour 2013, marqué par un important tour de vis fiscal. Le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, a désavoué le rapporteur PS de la commission des finances et une partie de son groupe sur des amendements imposant les oeuvres d'art à l'ISF et étendant la redevance audiovisuelle aux résidences secondaires...

Ce rejet a semé le trouble lors de la réunion hebdomadaire du groupe socialiste, dont l'un de ses porte-paroles, Thierry Mandon, a annoncé que le groupe ne voterait pas ces amendements, alors que le groupe lui-même ne s'était pas encore prononcé. "Nous ne sommes pas des godillots qui doivent avaliser les exigences ministérielles, la loi se fait jusqu'à preuve du contraire par les parlementaires", a dit Philippe Martin, un des vice-présidents du groupe PS, lors d'un point de presse.

La commission des finances a finalement rejeté l'amendement étendant la redevance TV aux résidences secondaires. Quant aux oeuvres d'art, "on ne peut pas retirer l'amendement puisqu'il a été voté en commission", a dit à Reuters le rapporteur de la commission des finances, Christian Eckert, qui est à son origine. "Il sera donc examiné."

"Ce sont des couacs à répétition. On a rarement vu ça en si peu de temps", a estimé Christian Jacob, président du groupe UMP, lors d'un point de presse. "Le Premier ministre est contredit par ses ministres. On est dans quelque chose d'invraisemblable. Ce n'est plus de l'impréparation, c'est de l'incohérence complète", a-t-il dit.

Bruno Le Roux, président du groupe PS, a relativisé ces critiques. "Quand on ne débat pas, on est considéré comme des godillots et quand on débat on dit que ce sont des couacs", a-t-il dit à Reuters. "J'ai une conception de la loyauté qui n'empêche aucun débat." Selon Roger-Gérard Schwartzenberg, président du groupe des Radicaux de gauche, "l'unisson n'est pas toujours atteignable mais la cacophonie n'est pas souhaitable, et la cacophonie est davantage du coté parlementaire que du coté gouvernemental".

Le projet de budget prévoit de ramener le déficit public de la France à 3,0% du produit intérieur brut fin 2013 contre 4,5% prévu fin 2012, une tâche jugée quasi impossible par les économistes. Vingt-neuf économistes interrogés par Reuters prévoient en moyenne que le déficit atteindra 3,5% fin 2013, en raison d'une croissance économique de seulement 0,3% l'an prochain, alors que le gouvernement prévoit +0,8%.

Le gouvernement prévoit d'augmenter les impôts de 20 milliards d'euros en 2013 (10 milliards sur les ménages et 10 sur les entreprises), en concentrant l'effort sur les grandes entreprises et les ménages les plus aisés. Dix milliards d'euros seraient parallèlement économisés sur les dépenses de l'Etat.

Les entreprises dénoncent ces hausses d'impôts, qui ont fédéré contre elles des organisations patronales, des associations de chefs d'entreprise et des entrepreneurs. Gilles Carrez, le président UMP de la commission des finances de l'Assemblée, a émis "deux regrets". "Que vous ne soyez pas allés plus loin sur les économies, c'est tout à fait possible", a-t-il dit à la tribune. "Et surtout", a-t-il ajouté, "face au problème numéro un de notre pays qui est la perte de compétitivité de nos entreprises, le principal défaut de ce budget c'est qu'il n'apporte aucun espoir à nos chefs d'entreprise".

Le gouvernement n'a pas présenté mardi devant la commission des finances ses amendements adoucissant la taxation des plus-values de cession de valeurs mobilières figurant dans son texte initial. Des amendements surnommés "pigeons", du nom d'un groupe d'entrepreneurs qui a contesté la hausse de cette taxation. Il pourrait les présenter ce soir.

L'examen de la première partie du budget, celle des recettes, doit durer jusqu'à samedi voire dimanche, plus de 650 amendements ayant été déposés dont les trois-quarts par l'UMP. L'Assemblée doit se prononcer mardi prochain par un vote solennel sur cette première partie.

©Crédit photo : REUTERS/Charles Platiau

Source : Reuters

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